Dialogue social, santé et emploi : ce qui va changer avec la loi Rebsamen (2/2)
Pénibilité, inaptitude AU travail, renouvellement des CDD, CV anonyme...suite du tour d'horizon des principales mesures de la loi Rebsamen relative au dialogue social et à l'emploi.
Santé au travail Simplification du compte pénibilité.
Ce compte, créé par la réforme des retraites de 2014, permet aux salariés exposés à des conditions de travail éprouvantes de cumuler des points leur donnant droit à un départ anticipé en retraite, une diminution du temps de travail, ou une formation.
Certains facteurs sont applicables depuis le 1er janvier 2015 (travail de nuit, activité exercée en milieu hyperbare, travail en équipes successives alternantes, travail répétitif) et d’autres le seront au 1er juillet 2016 (manutentions manuelles de charges, postures pénibles, vibrations mécaniques, agents chimiques dangereux, températures extrêmes et bruit). Afin d’aider les employeurs à apprécier les situations d’exposition aux facteurs de pénibilité, les accords de branches étendus peuvent établir des « modes d’emploi » caractérisant l’exposition des travailleurs à la pénibilité en fonction de leur poste. La loi prévoit que ces accords pourront déterminer ces expositions en fonction des postes, mais aussi en fonction des métiers ou des situations de travail exposés. En outre, à défaut d’accord, ces « modes d’emploi » pourront aussi être établis par des « référentiels professionnels de branche homologués » par arrêté interministériel. L’employeur qui appliquera le référentiel sera présumé de bonne foi. Il s’agit de protéger les entreprises qui appliquent un référentiel établi par la branche mais non encore homologué.
En outre, l’employeur n’aura pas à établir et transmettre au salarié la fiche individuelle d’exposition. Il déclarera l’exposition de ses salariés aux caisses de retraite (Carsat) qui se chargeront d’informer le salarié de son exposition et des points dont il bénéficie. Pratiquement, l’employeur effectuera une seule déclaration et le salarié recevra de la caisse un seul document d’information récapitulant son exposition à la pénibilité et le nombre de points qu’il a acquis de ce fait.
Le délai d’action contentieuse du salarié en vue de l’attribution de points passera de trois à deux ans. De même, le délai de contrôle des caisses de retraite sera diminué de cinq à trois ans.
Médecine du travail : inaptitude au travail
La loi facilite la rupture du contrat de travail du salarié déclaré inapte, à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle. L’employeur pourra le licencier dès lors que l’avis du médecin du travail « mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ». Dans un tel cas l’employeur sera dispensé de rechercher un reclassement.
Lorsqu’il préconise un aménagement du poste de travail, le médecin du travail pourra proposer à l’employeur l’appui de l’équipe pluridisciplinaire ou d’un organisme compétent en matière de maintien en emploi. Lorsque des difficultés ou désaccords naissent du fait des préconisations du médecin du travail, l’employeur ou le salarié peut saisir l’inspecteur du travail.
La loi prévoit expressément que l’inspecteur du travail devra désormais informer la partie qui ne l’a pas saisi avant de prendre sa décision. Par ailleurs, la place des institutions représentatives du personnel sera renforcée lorsque le médecin du travail constate la présence d’un risque pour la santé des travailleurs.
Ses propositions, ainsi que la réponse de l’employeur, devront être transmises au CHSCT ou, à défaut, aux délégués du personnel (et à l’inspecteur du travail, au médecin-inspecteur du travail, etc.), et non plus seulement tenues à leur disposition.
Vers la reconnaissance du burn out.
La loi précise que « les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle », via des commissions régionales qui existent déjà. Rappelons en effet que les risques psychosociaux ne font pas partie des pathologies inscrites au tableau des maladies professionnelles. Un décret doit faciliter le recours à des psychiatres dans ces commissions. Le texte prévoit également la remise « avant le 1er juin 2016 », d’un rapport « sur l’intégration des affections psychiques dans le tableau des maladies professionnelles ».
Autres mesures Un compte personnel d’activité en 2017.
Un compte personnel d’activité regroupant les différents comptes existants (pénibilité, formation, épargetemps…) serait crée au 1er janvier 2017. Ce compte fera l’objet d’une concertation avec les partenaires sociaux sur ces contours, avant le 1er décembre 2015. Les modalités du compte, que les salariés pourront conserver tout au long de leur carrière, seront précisées par une loi en 2016.
Le renouvellement des CDD assoupli.
Les contrats à durée déterminée (CDD) et les contrats d’intérim pour surcroît d’activité pourront être renouvelés deux fois, au lieu d’une actuellement. Mais cet assouplissement se fait « sans toucher à la durée maximale de 18 mois », prévue par la loi.
Suppression du CV anonyme. Depuis la loi du 31 mars 2006 sur l’égalité des chances, ce dispositif est obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés, mais le décret d’application qui devait en préciser les modalités n’a jamais été publié. En juillet 2014, le Conseil d’État avait enjoint le gouvernement de corriger l’anomalie. Le ministre du Travail avait plaidé que la systématisation du CV anonyme « aurait pu constituer un frein à la lutte contre les discriminations à l’embauche ». Le groupe de dialogue sur la lutte contre les discriminations à l’embauche et dans l’emploi avait estimé que sa généralisation comme réponse unique pour lutter contre les discrimination n’était pas pertinente.
Le régime des intermittents du spectacle consacré. Le Code du travail stipule désormais que la spécificité des métiers du cinéma, de l’audiovisuel et du spectacle vivant justifie des règles spécifiques d’indemnisation annexées à la convention d’assurance chômage.
Contrat d’apprentissage. L’obligation de relever d’un accord de branche comportant des engagements en faveur de l’alternance pour bénéficier de l’aide au recrutement des apprentis de 1 000 euros pour les entreprises de moins de 250 salariés est supprimée. La période d’essai du contrat d’apprentissage est modifiée. Jusqu’à présent, elle était de deux mois et incluait le temps passé à l’école. Sa durée est réduite à 45 jours, mais seule la durée de présence effective dans l’entreprise de l’apprenti sera prise en compte.
Lutte contre les agissements sexistes. Une disposition est introduite pour lutter contre le sexisme au travail. Ainsi, « nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».