Une industrie manufacturière de plus en plus marginalisée
Le poids de l’industrie manufacturière ne cesse de reculer depuis les années 70, en France, avec une forte accélération entre 2000 et 2007, selon l’Insee. Un déclin qui trouve sa source dans une combinaison de phénomènes tels que l’externalisation, la concurrence étrangère et la crise économique.
Dans une récente étude, l’Insee dresse un état des lieux de l’industrie manufacturière depuis les années 70. En 40 ans, le poids de l’industrie a été divisé par deux pour ne représenter plus que 11,2% du PIB en 2014, contre 22,3% en 1970. Pour autant, la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière s’élève à 213,8 milliards d’euros et a été multipliée par 8,6 au cours des dernières décennies. Une croissance en valeur bien plus faible que le reste de l’économie qui a été multipliée par 17,2, sur cette même période. Ce déclin s’explique principalement par un effet “prix” avec des prix qui ont évolué plus modérément dans l’industrie grâce à des gains de productivité plus importants que dans les autres secteurs de l’économie (3,2% par an contre, 1,7%, dans l’ensemble de l’économie, de 1970 à 2014). Toutefois, l’Insee constate une accélération du processus de désindustrialisation depuis les années 2000 avec d’abord une nette chute des gains de productivité dans l’industrie, en comparaison des autres secteurs, en particulier par rapport aux services. Et enfin à partir de 2007, la crise économique a fortement impacté un secteur industriel déjà fragilisé.
Une concurrence internationale accrue L’externalisation d’une partie des activités de l’industrie pour se concentrer sur leur cœur de métier depuis 40 ans a participé à l’affaiblissement du poids du secteur dans la valeur ajoutée. Ainsi, depuis les années 70, et surtout au cours des années 90, les industriels ont consommé une part croissante de consommations intermédiaires de services principalement marchands. La concurrence mondiale a participé pour une grande part au déclin de l’industrie française avec une forte hausse des importations. Ainsi sur la période concernée, les importations de produits manufacturés ont progressé en moyenne de 8,4% par an alors que la production augmentait de 5,2%. « Au total, la part des importations dans les produits manufacturés atteint 36% en valeur courante en 2014, contre 13% en 1970. C’est de 1979 à 1989 que la progression est la plus marquée », indique l’étude de l’Insee. Du côté des exportations, si elles progressent fortement en valeur (+8,1% par an) et en volume (+5,1%) sur les quatre dernières décennies, elles restent en deçà de la hausse des importations en valeur comme en volume. La balance commerciale des produits manufacturés se dégrade ainsi progressivement et devient déficitaire en 2007, avec un pic en 2011 qui tend depuis à se résorber. Au niveau de la demande intérieure, sans surprise avec la hausse des revenus, elle progresse de 5,8% en valeur et de 2,2% en volume, par an, sur les 40 dernières années pour les produits manufacturés. Toutefois, la consommation des services marchands augmente plus rapidement (+7,7%, en valeur et + 2,9%, en volume), les agents économiques affectent une part importante de leurs revenus disponibles dans la consommation de services. Enfin, les moindres gains de productivité dans le secteur des services participent automatiquement à l’évolution plus soutenue des prix sur ces biens. « Cet écart de prix ne se répercute pas entièrement en termes de demande supplémentaire de produits manufacturés du fait de leur moindre sensibilité aux prix et de leur substituabilité limitée avec les services », précise l’Institut de statistique.
Certaines industries résistent Le tableau n’est pas totalement noir pour l’industrie. Cinq branches manufacturières, sur 13, ont mieux résisté, avec une valeur ajoutée qui progresse plus rapidement que le secteur en général. Il s’agit de la pharmacie, les matériels de transport, l’industrie agroalimentaire et la réparation-installation. À l’exception de la pharmacie, l’ensemble de ces branches voient leur valeur ajoutée augmenter en valeur. La pharmacie compense par une hausse plus importante de ses volumes.
Alban LE MEUR