Une loi de Finances technique, à la recherche de petites économies
Pas de bouleversements majeurs à attendre dans la loi de Finances 2020, mais plutôt des adaptations de dispositifs existants, souvent destinés à trouver de petites économies pour le budget de l’État. Décryptage par les notaires et les experts-comptables.
« Nous sommes dans le contexte d’une loi de Finances qui n’est pas révolutionnaire mais très technique. Elle s’inscrit dans la logique d’une recherche de ressources, dans la continuité du mouvement des Gilets jaunes. Pour la fiscalité des entreprises, il y a beaucoup de dispositifs ponctuels, techniques, mais pas de bouleversements », explique Sylvain Guillaud-Bataille, notaire. Le 9 janvier, à Paris, au siège du Conseil supérieur du notariat (CSN), il présentait, avec Virginie Roitman, expert-comptable, un décryptage de la loi de Finances 2020.
Parmi les mesures qui concernent les entreprises, le fonctionnement du crédit impôt recherche ne change pas mais « il est un tout petit peu moins avantageux », note Sylvain Guillaud-Bataille. Par ailleurs, « la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés a été retouchée pour aller moins vite », poursuit le notaire. Cela concerne les entreprises de plus de 250 millions d’euros de chiffre d’affaires, mais l’objectif final d’un taux unique de 25% en 2022 demeure. Plusieurs mesures de sur amortissement sont créés dont celle pour les véhicules neufs non routiers utilisant des énergies alternatives au GNR, (pour 40% de la valeur du bien). Il est destiné à certaines entreprises, dont celles du BTP. La prime pour le pouvoir d’achat, défiscalisée, plafonnée à 1 000 euros pour les salariés qui touchent moins de trois fois le Smic est reconduite, mais sous réserve de s’inscrire dans le cadre d’un accord d’intéressement. Ce dernier a été simplifié pour les entreprises de moins de 11 salariés.
Le mécénat fait l’objet de modifications, dont l’une est favorable aux PME : le plafond des sommes pouvant faire l’objet d’une déduction fiscale (60% de la somme) passe de 10 000 euros à 20 000 euros (ou à 0,5% du chiffre d’affaires, mesure qui reste inchangée). La loi de Finances pour 2020 prévoit l’obligation, pour toutes les entreprises qui facturent un organisme public de le faire par voie électronique. Plusieurs mesures concernent également la TVA, « traduction de directives européennes », pointe Sylvain Guillaud-Bataille pour améliorer l’efficacité de sa collecte.
Un gain de 300 euros par foyer fiscal
Concernant la fiscalité des particuliers, le gain est parfois du côté du contribuable, et non du budget de l’État. « Un gain de 300 euros par foyer fiscal », note Virginie Roitman. C’est le résultat du passage du taux d’imposition qui, de 14% sur les revenus 2019, passe à 11% pour les revenus de 2020, pour les contribuables de la deuxième tranche d’impôt (de 10 064 à 27 794 euros). Quant à la taxe d’habitation sur la résidence principale pour tous, le processus de son extinction est confirmé. La loi de Finances prévoit une exonération de 30% en 2021, de 65% en 2022, et totale en 2023. Le coût total estimé pour le budget de l’État est de 18 milliards d’euros.
En juin prochain, une mesure administrative devrait « faire du bruit » d’après Virginie Roitman. Les 12 millions de personnes (environ le tiers des ménages) qui, jusqu’à présent, allaient valider leur déclaration de revenus pré-remplie sur le site impot.gouv.fr, n’auront plus rien à faire. En revanche, ceux qui disposent d’autres revenus, fonciers, par exemple, devront continuer à confirmer – ou non – les déclarations pré-remplies.
2020 sera aussi l’année de l’application du prélèvement à la source pour les salariés employés de maison. L’employeur devra déclarer ses salaires auprès de l’administration (Urssaf, CESU ou Pajemploi) qui indiquera le montant net à payer après impôt à la source. Autre nouveauté : c’est la fin de l’exonération d’impôt sur les primes des contrats d’assurance-vie souscrits avant 1983.
Une autre mesure constitue « peut-être un effet d’annonce », ajoute Virginie Roitman. Dorénavant, les dirigeants de sociétés françaises qui résident à l’étranger, mais dont l’activité professionnelle principale se déroule sur le territoire français, seront considérés comme résident, et à ce titre, redevables de l’impôt sur le revenu. Mais en raison des conventions fiscales internationales qui prévalent sur la loi de Finances, « cela pourrait concerner peu de monde », note Virginie Roitman.
La fiscalité successorale, grande absente de la loi
« Il n’y a rien sur le sujet de la succession », note Sylvain Guillaud-Bataille, qui rappelle qu’originellement, Emmanuel Macron avait pris position pour les donations, au détriment des successions. En 2019, d’après le notaire, des bruits ont couru sur de potentielles mesures destinées à encourager les donations aux plus jeunes ou de faire bénéficier d’abattements moins importants pour les patrimoines les plus massifs. Depuis, plus rien.