SIA, la fusion c’est maintenant…
le pavillon collectif de Picardie a trôné neuf jours durant sur 200 m² au Salon international de l’agriculture qui a fermé ses portes le 1er mars. Si comme tous les ans pour la région il était question de mettre en avant le terroir picard, et plus particulièrement les brasseries, cette édition avait une saveur particulière, celle du futur rapprochement avec le Nord-Pas-de- Calais.
Cinq brasseurs de la région estampillés Terroirs de Picardie avaient cette année les honneurs du stand collectif, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ont rencontré un franc succès, certains visiteurs estimant, à juste titre, « que la bière picarde est meilleure que la météo »… L’espace Terroirs de Picardie proposait lui plus de 100 produits régionaux (sur les 600 référencés), avec les incontournables « et un focus cette année sur le croustillon picard, l’occasion de faire découvrir la filière céréales et de mettre en avant un produit festif », précise Alain Bahuchet, chargé de mission du Comité de promotion. Comme tous les ans, les visiteurs se sont mués en acheteurs, « beaucoup de Parisiens sont curieux et veulent découvrir de nouvelles saveurs, et d’autres sont devenus de fidèles clients de nos produits, et viennent sur le salon faire leurs courses », indique-t-il.
Mais la grande nouveauté de cette année, c’est sans conteste le rapprochement affiché de la Picardie et du Nord – Pas-de-Calais, qui loin des discordes qui ont agité le monde politique à l’annonce de la régionalisation, affichaient un esprit de concorde sans fausses notes. Une fusion qui s’est revendiquée jusque dans la carte du menu concocté ce 24 février par les élèves du lycée hôtelier Le Corbusier de Soissons pour les édiles ayant fait le déplacement, avec dans les assiettes des plats mêlant spécialités picardes et nordistes. Les convives ont eux aussi joué le jeu, privilégiant les bières picardes pour les Nordistes, et vice-versa. À la table du président Claude Gewerc, Daniel Percheron, son homologue du Nord-Pas de-Calais (né à… Beauvais) et Pierre de Saintignon, candidat à la présidence de la future région.
la Picardie, terre agricole du futur
Mais au-delà de ce rapprochement factuel, les deux régions ont tout intérêt, en matière d’agriculture comme dans les autres domaines, à aller dans le même sens, et ont les cartes en main pour se faire une place de choix. Pour le président de région Claude Gewerc, les atouts de la Picardie, terre agricole par excellence, sont indéniables : « Le pôle de compétitivité IAR est le premier est le plus important du genre en France, et en Europe. Nous sommes capables de transformer la plante à quelque niveau que ce soit, pour produire de l’énergie, c’est l’agriculture de demain ! » Le président s’avoue « mort de rire » lorsqu’il entend encore des propos ironiques sur la Picardie terre de betteraves, « l’IAR mène de nombreuses recherches sur la matière, et la betterave est la plante que l’on peut cultiver le plus de fois, et de laquelle on peut extraire le plus de matière, les agriculteurs d’aujourd’hui sont des techniciens, et ceux de notre région très impliqués dans l’agro-transformation ».
À cette technicité s’ajoute pour le président de la chambre d’agriculture Christophe Buisset « une capacité de production multiple – laitières, animales, fromagères… -, des fleurons de l’agroalimentaire comme Bonduelle ou Lunor, de bonnes conditions climatiques et des agriculteurs bien formés comparé aux autres régions ».
Et Christophe Buisset se plaît à rêver d’une « Sillicon Valley industrielle, agroalimentaire et de la chimie verte », avec la future grande région qui se profile : « Demain, nous serons une très grande région, avec une force de frappe énorme, grâce à notre positionnement géographique, au large bassin de consommation, nous avons une chance inouïe de nous retrouver au milieu de ce Hub agroalimentaire. » C’est certes un « gros challenge », mais pas l’ombre d’un doute pour Christophe Buisset, cette future grande région en a les capacités, « si elle y met les moyens, à nous de savoir quels projets mettre sur pied et pousser les politiques dans le bon sens… »
Création d’une chaire agro-machinisme picarde
C’est une première européenne, et elle a été actée sur le Salon international du machinisme agricole (Sima) à Villepinte le 25 février. La création de la chaire Agro-machinisme et nouvelles technologies (une opération de 2 267 000 euros), au sein de l’institut polytechnique LaSalle Beauvais a entre autres ambition celle de répondre aux grands défis des mutations de l’économie agricole, et constitue pour la région une nouvelle étape pour développer ce secteur. « C’est en effet une nouvelle pierre que nous posons ensemble, en Picardie, en vue de faire de notre région un territoire fertile pour concevoir et produire les équipements qui feront l’agriculture de demain », a confirmé le président de région Claude Gewerc, qui a également rappelé l’ambition de la région de « créer un pôle d’excellence en agro-machinisme », estimant que la Picardie avait « pour cela tous les atouts nécessaires », notamment la culture de l’innovation et la proximité entre recherche, industrie et formation. Cette chaire va permettre de conforter et mettre en avant les atouts de la région, qui valorise depuis longtemps déjà son agriculture par la transformation industrielle. Et pour y parvenir, des industriels, le leader européen du logiciel agricole Isagri, Michelin et Agco – Massey-Ferguson se sont greffés au projet, aux côté des collectivités – la région et l’agglo du Beauvaisis – et de LaSalle Beauvais. Avec l’assurance également de pouvoir s’appuyer sur les outils existants, comme IndustrieLab (laboratoire de l’usine de demain pour la réalité virtuelle et l’usinage des composites) ou encore la nouvelle plateforme hydraulique de l’institut de mécatronique. Pour l’ensemble des acteurs concernés, cette chaire fait prendre une longueur d’avance à l’agro-machinisme picard et répond pleinement aux nouvelles exigences pour les agriculteurs, que ce soit en termes de compétitivité, de développement durable ou de valorisation des productions. La Picardie, avec 4 000 salariés évoluant dans la fabrication de machines agricoles, se place au troisième rang des régions françaises dans ce domaine.
Adrien Rouquette dirige la brasserie familiale Maeyaert (24 salariés) installée à Milly-sur-Thérain depuis 25 ans. Ses spécialités : le cidre, et la bière. Si la production de bières ne représente que 10 à 15% de l’activité, la Médaille d’or du concours général agricole 2015 décrochée cette année au salon pour l’ambrée Milliacus va certainement booster les ventes de cette dernière. En 2013 déjà, la brasserie était repartie avec une médaille d’argent, « c’est une chance pour nous, explique Adrien Rouquette, pendant un an, cette récompense sera affichée sur les étiquettes des bouteilles ». Des distinctions qui confortent la brasserie Maeyaert dans l’envie de développer de nouvelles bières, « avec des recettes améliorées, sans pour autant dénaturer leur essence, et en respectant la tradition des bières du Nord et picardes. D’autant que nous avons de très bons retours des visiteurs du Salon, ils suivent la tendance nationale, en 2013, environ 80 nouvelles brasseries se sont ouvertes en France, les clients goûtent de plus en plus le côté local et artisanal et apprécient de découvrir de nouvelles saveurs, assure le dirigeant. Le consommateur qui auparavant achetait par habitude une seule marque de bière apprécie aujourd’hui la diversité qui lui est proposée, et se fait plus curieux. » Un néologisme est même apparu : la biérologie…