Les conditions s’améliorent pour le secteur de l’éolien
Soulagement des professionnels de l’éolien, après les mesures prises par l’Assemblée nationale et les déclarations de la ministre Delphine Batho. Mais tout n’est pas résolu pour autant : sur le territoire, les schémas régionaux mis en place ne permettraient pas partout un égal développement de l’éolien.
La semaine dernière a été fructueuse pour le secteur de l’éolien : Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, a annoncé que le gouvernement allait engager des discussions avec la Commission européenne à propos de l’arrêté tarifaire éolien. De plus, à l’Assemblée nationale, diverses mesures intéressant le secteur ont été confirmées, comme la suppression des ZDE (zones de développement éolien) et de la règle qui exigeait que tout nouveau parc éolien soit constitué de cinq mâts minimum, ainsi qu’un aménagement de la loi Littoral pour simplifier l’implantation d’éoliennes dans les départements d’Outremer. Et la proposition de loi instaurant une tarification progressive de l’énergie a été adoptée.
« Les professionnels de l’éolien respirent enfin », commente France Energie Eolienne (FEE), organisme qui regroupe quelque 250 professionnels du secteur, dans un communiqué de presse. Au total, c’est l’essentiel de ses revendications d’ordre réglementaire qui sont satisfaites. « Avec l’éolien, nous avons un très fort potentiel. La France dispose du 2ème gisement au vent en Europe, derrière le Royaume- Uni. C’est une énergie compétitive, légitime dans le cadre de la transition énergétique (…) Et pourtant la filière est en décélération. En 2012, les quantités installées vont diminuer de 20 % environ par rapport à 2011, qui était déjà en recul par rapport à 2010 », s’inquiétait Nicolas Wolff, président de FEE, le 10 janvier, lors d’une conférence de presse à Paris. « L’urgence absolue », expliquait-il, c’est la question de l’arrêté tarifaire. « Aujourd’hui, nous sommes fragilisés. Les banques françaises refusent de financer les parcs », ajoutait le président de FEE. Reste à voir si le fait que la ministre ait déclaré qu’elle allait engager la discussion avec Bruxelles sera suffisant à rassurer les banquiers. Autre revendication, qui semble avoir été oubliée au passage : les professionnels de l’éolien souhaitaient passer d’un régime d’autorisation à un régime de déclaration pour l’ouverture des parcs.
Notes aux régions
Mais les soucis des professionnels de l’éolien ne se limitent pas aux questions réglementaires. C’est également la manière dont sont appliqués les textes qui freine leur activité, d’après eux. Et, ce 10 janvier, FEE a fait un bilan sur la mise en place des schémas régionaux éoliens. Bon élève : la région Nord – Pas-de-Calais. Mauvais élève : la région Centre. Institués par le Grenelle de l’Environnement, ces schémas sont destinés à définir sur le territoire les zones sur lesquelles il est possible d’implanter des parcs d’éoliennes, et celles sur lesquelles cela sera interdit, pour des raisons techniques (couloir aérien, par exemple), patrimoniales ou environnementales. Premier constat de la FEE, début 2013, la quasi-totalité des schémas ont été adoptés sur le territoire. Seules trois régions manquent à l’appel. En revanche, sur le contenu des schémas, « il y a des variations assez fortes d’une région à une autre », remarque Nicolas Wolff. Ainsi, celui de la Picardie constitue un « exemple de schéma réussi », estime Vincent Masureel, président des groupes régionaux de FEE. Dans ce cas, la délimitation des zones favorables à l’implantation d’éoliennes est cohérente avec l’objectif fixé en nombre de mégawatts. A contrario, pour Vincent Masureel, le « mauvais exemple » c’est la région Centre : les zones favorables définies seraient trop étriquées.
De façon générale, FEE a effectué son évaluation des schémas en fonction de plusieurs critères : le fait d’avoir fait ou non l’objet d’une concertation large, d’être en adéquation avec le potentiel de la région et de proposer des zones d’implantations possibles pour les éoliennes, assez larges pour être viables. De ce point de vue, « les meilleures régions sont le Nord-Pas-de- Calais, La Picardie, l’Ile-de-France, car leurs objectifs collent avec leurs capacités », estime Vincent Masureel. Pour l’Aquitaine, par exemple, « l’ambition n’est pas très élevée, mais le gisement de vent n’est pas énorme. Cela ne sert à rien de planifier ». En revanche, en Auvergne ou Poitou-Charentes, « le schéma n’est pas en phase avec les capacités » de la région, poursuit Vincent Masureel. En termes de raccordement effectivement réalisé, parmi les régions les plus avancées figurent la Picardie et Champagne-Ardenne. Et dans certaines régions, comme en Ile-de-France ou en PACA (Provence- Alpes-Côte d’Azur), notamment, « il y a encore beaucoup à faire », juget- il. Quant au Languedoc-Roussillon, « c’est l’une des premières régions en termes de parc éolien. Aujourd’hui, ils ont un très grand potentiel à l’horizon 2020 », estime Vincent Masureel.
Le coût du raccordement
Autre souci pour EFF, « ces schémas ne donnent pas de certitude quant au développement des parcs éoliens.(…) Après, il y a plusieurs jalons, comme le permis de construire, le raccordement au réseau … », explique Nicolas Wolff. Et, à ce stade, se pose la question des schémas régionaux de raccordement. Actuellement, une méthodologie pour les établir est en cours de finalisation au niveau national. Mais « certains schémas régionaux ont déjà pu être adoptés, car des préfets ont voulu engager le schéma sans attendre la méthodologie nationale (…) Dans les régions locomotives, ces schémas ont été adoptés », précise Serge Galaup, responsable de la commission raccordement électrique. C’est le cas, par exemple, en Picardie et en Champagne-Ardennes ou en Alsace et en Bourgogne. Autre souci, à ce stade, pour la profession : le coût de la quote-part. « Dans ces schémas sont prévues les quotes-parts pour mutualiser les efforts de financement engagés pour développer le réseau susceptible d’accueillir de nouvelles énergies », explique Serge Galaup. Or, cette contribution remettrait en cause la rentabilité financière de projets qui ont démarré depuis plusieurs années, sans prévoir cette contrainte. « Nous sommes très préoccupés. De région à région, c’est hétérogène, car les besoins à construire sont différents (…) », poursuit Serge Galaup. Dans une région, cette quotepart induit un coût supplémentaire de 80 euros le mégawatt, alors que dans une autre région, où les ambitions sont réduites, ce coût est de zéro, car il a été considéré que le réseau ne nécessiterait pas d’aménagement.