Investissement
L'apport de capital et l'expertise humaine réunis dans un fonds territorial
Mixer un accompagnement financier et des compétences managériales : alors que les entreprises vivent des moments difficiles, Entreprises et Cités, le groupe IRD, IHEGC (Institut des Hautes Etudes en Gestion des Crises) et un collectif d'entrepreneurs, viennent de lancer le premier fonds entrepreneurial territorial de transformation, baptisé FE2T.
S'il est lancé en plein période de
Covid-19, le FE2T était dans les tuyaux depuis plusieurs mois déjà.
Dix entrepreneurs y ont d'ores et déjà apporté leur soutien pour
un montant de 60 millions d'euros : au-delà du ticket financier, c'est aussi un
accompagnement humain qu'ils souhaitent apporter, et c'est ce qui
distingue ce fonds de ce qui peut déjà exister. Les entreprises
cibles, tous secteurs confondus, sont des PME/ETI à "haut
potentiel" (sous-entendu, plus de 25 millions d'euros de chiffre d'affaires) et
qui veulent s'engager dans la transformation : rupture de modèle
technologique, concurrentiel, de RSE, de gouvernance... Le FE2T
s'appuie sur l'expérience de gestion apportée par IRD Gestion,
filiale du groupe IRD. D'une durée de 12 ans (voire de 14), le FE2T
s'appuie sur des prises de participations minoritaires pour des
montants compris entre 5 et 15 millions d'euros. « Nous
pouvons aussi accompagner les entreprises qui ont besoin de plus.
Nous voulons créer un écosystème qui associe des entrepreneurs et
des compétences et visons un premier closing de 100 millions d'euros au premier
trimestre 2021 », explique Thierry Dujardin, directeur général du Groupe IRD. S'il se
garde de citer des noms ou des secteurs d'activités, il y aurait
déjà trois candidats potentiels alors que des dossiers sont déjà
sur la table. Sur les 400 entreprises des Hauts-de-France qui
affichent un CA de plus de 25 millions d'euros, près de la moitié sont encore à
capitaux familiaux. Les entreprises seront accompagnées sur cinq ans
: un engagement sur le long terme. « Il
s'agira de co-construire un plan de transformation avec le chef
d'entreprise », poursuit Thierry Dujardin. Au total, près de 90 jours
d'accompagnement et d'intervention, au-delà des missions actuelles
du Groupe IRD. « Il ne
s'agira pas de juger uniquement les finances mais bien de savoir
comment financer la transformation et faire évoluer les business
modèles. Les entrepreneurs investis prennent un engagement pour
passer du temps sur des dossiers », prévient Jean-Pierre Letartre, président du Groupe IRD.
Diagnostiquer
mais surtout, mettre en œuvre
Parmi les premiers souscripteurs à ce fonds, Octave Klaba (OVHcloud), Barthélémy Guislain (AFM), Patrick Colin (Unither)... L'investissement personnel du fondateur d'OVHcloud s'élève à 20 millions d'euros : « J'ai envie de participer à ce qui se passe dans la région. J'ai créé OVH pour faire face à la transformation numérique mais aujourd'hui, le numérique, ce n'est pas uniquement du cloud ou des data center : on parle de travail collaboratif, d'intelligence artificiels, de voitures autonomes... Il faut faire la différence vis-à-vis des concurrents. » Et Thierry Dujardin de préciser : «Tous les entrepreneurs peuvent investir, nous allons bien évidemment ouvrir des tickets d'entrée plus faibles. Ils investiront dans une société civile que nous allons créer. » Soutenu par la Région Hauts-de-France et réalisé en collaboration avec Picardie Investissement, la Caisse d'Epargne Hauts de France et le réassureur Scor, le FE2T peut aussi s'appuyer sur l'expertise d'Arnaud Marion, fort de 300 dossiers d'entreprises traités à son actif et de plus de 40 mandats de direction générale exercés dans le monde bancaire, industriel ou des services. « Les crises naissent quand les entreprises ne se transforment pas. Les entrepreneurs ont besoin de fonds et d'expertise mais trop souvent des erreurs sont commises. On pense que c'est conjoncturel alors qu'en fait, c'est structurel. Se transformer pour une entreprise, c'est savoir qui elle est, ce qu'elle fait et pourquoi. L'idée ? Un basculement culturel des entreprises », détaille le fondateur de l'IHEGC. Derrière ce fonds, l'envie aussi de conserver en Hauts-de-France, les entreprises qui pourraient être attirées par des fonds nationaux ou internationaux. Le FE2T s'est fixé l'objectif d'une dizaine d'opérations. « Dix dossiers cela peut paraître peu mais il faut considérer les sous-traitants, les fournisseurs, les clients... La création de valeur n'est pas uniquement financière. Si on arrive à construire déjà dix pépites, le pari sera gagné », argumente Thierry Dujardin.