Emploi : l'intérim décroche
55 000 emplois ont disparu dans le secteur privé depuis le début de l’année 2012. La tendance n’est toutefois pas comparable à la chute brutale de l’emploi lors de la crise de 2008-2009, d’après les Urssaf. Mais la forte baisse de l’Interim constitue un signal d’alarme.
L’emploi est en baisse pour le troisième trimestre consécutif, a annoncé l’Acoss, l’agence centrale des organismes de sécurité sociale, lors d’une conférence de presse de « présentation de la situation économique vue par les Urssaf », le 11 décembre dernier. Depuis le début de l’année, 55 000 emplois ont disparu dans le secteur privé, soit une diminution de 0,15% qui succède à des évolutions de -0,05 et -0,10 % les trimestres précédents. « Ce repli de l’emploi commence à être significatif, mais la tendance n’est pas similaire à celle de 2008. Il s’agit d’un retournement, pas d’un effondrement », commente Alain Gubian, directeur des statistiques, des études et de la prévision de l’Acoss. En dix-huit mois, la crise de 2008 avait détruit 586 000 emplois.
Géographiquement, ce troisième trimestre 2012, tous les territoires ne connaissent pas la même évolution. En métropole, certains régions sont créatrices d’emploi, d’autres en détruisent. Ainsi, l’Acoss constate une croissance de 1,4 % de l’emploi en Corse. A contrario, la Picardie, la Champagne-Ardenne, le Limousin et la Lorraine enregistrent des pertes de plus de 1 % de leurs emplois. Au coeur d’un sud plutôt créateur d’emplois, « le Languedoc-Roussillon souffre plus de la conjoncture (…) Le Midi-Pyrénées peut bénéficier de la mégalopole de Toulouse, avec beaucoup d’industries, le secteur aéronautique. Les régions sont portées par des activités spécifiques », analyse Alain Gubian.
Tendances modérées
De fait, les différents secteurs présentent eux aussi des évolutions différenciées en matière d’emploi. En 2012, le tertiaire, hors interim, qui représente plus de 12 millions d’emplois, reste globalement stable sur le trimestre, avec un taux de croissance de 0,5 % sur un an. Ce secteur, qui est le plus important numériquement, comporte notamment la santé, l’action sociale ou l’éducation. Autant d’activités qui sont « moins marquées par la conjoncture et plus portées par les politiques publiques », note Alain Gubian. Elles affichent donc de légères hausses (inférieures à 1%), au même titre que l’hôtellerie-restauration. Toutefois, le tertiaire comporte également des activités qui se portent mal. Parmi elles, l’édition et l’audiovisuel sont en baisse de 1 %, au même niveau que l’immobilier. Cette dernière activité avait déjà connu un trimestre négatif. Retournement de tendance, en revanche, dans le secteur informatique. Celui-ci, qui avait bénéficié d’une évolution positive de 0,5 % au trimestre précédent, est passé à un repli de 0,1 %. Dans la construction, qui concentre 1,5 million d’emplois, la baisse sur un an atteint 0,8 %. Quant au secteur des associations, (environ 1,7 million de salariés pour 9 milliards d’euros de masse salariale), il connaît un très faible ralentissement de l’emploi ( -0,1 %) , après une légère accélération le trimestre précédent. Un emploi plutôt « contra -cyclique », lié à des mesures de politique publique, note Alain Gubian. Le secteur industriel, qui représente quelque 3 millions d’emplois, a connu une légère baisse (0,3 %), qui porte l’évolution des effectifs à -0,7 % sur l’année.
Alarme Interim
Exception de taille, au milieu de ces courbes molles, l’interim. Les effectifs de ce secteur ont diminué de 4,1 % sur le trimestre, soit -9,1% sur un an. Et c’est cette tendance qui pourrait bien expliquer la relative stabilité de l’emploi salarié dans l’industrie. Pour l’instant, « c’est l’interim qui constitue la variable d’ajustement », analyse Alain Gubian. Son évolution représente donc un signal inquiétant. « Lors de la crise de 2008, tous les pays connaissaient une forte baisse de leur PIB, une récession, des chutes de l’emploi. A présent, nous sommes plutôt dans une période d’attentisme. (…) le cycle de croissance n’est pas le même. Malgré tout, l’emploi peut s’ajuster avec retard. Il est possible qu’il y ait rétention d’emploi, car les entreprises pensent que ce sera mieux demain. Mais s’il y a d’autres signaux moins positifs, cela pourrait conduire à une accélération de la diminution de l’emploi », met en garde Alain Gubian. L’Acoss est également bien placée pour mesurer un autre signal de tension : le taux d’impayés auprès des Urssaf, qui est à la hausse. Tout comme les demandes de délais de paiement formulées par les entreprises.