Amiens Métropole : une sphère d'attraction en expansion
Amiens Métropole, qui regroupe 39 communes, est l'agglomération qui gère les destinées économiques du territoire depuis plus de 30 ans. Ses compétences ne s'arrêtant pas là, son président Alain Gest et ses services, mutualisés avec la Ville d'Amiens, s'attachent à ce que l'ancienne capitale régionale dont elle a perdu le statut, trouve une meilleure place au sein de la grande région Hauts-de-France. Son développement économique, démographique et touristique joue en sa faveur.

Vous êtes président d'Amiens Métropole depuis 2014, comment est née cette collectivité ?
Amiens Métropole a été créée en 1994 à l'initiative du député - maire de l'époque, Gilles de Robien, qui souhaitait former une structure intercommunale sur la base de ce qu'on appelait alors le district, elle regroupait à l'origine 14 communes. La volonté était de soutenir des projets à cette échelle intercommunale pour avant tout améliorer les conditions de vie des citoyens. La résolution de départ était également de développer une structure non politisée entre des communes qui sont parfois très opposées politiquement. C'est pourquoi Gilles de Robien a délibérément choisi que la ville d'Amiens soit minoritairement représentée au sein d'une collectivité intercommunale qui n'est pas préoccupée par la politique, mais uniquement par les projets à destination de la population.
La structure a évolué, notamment au passage à l'an 2000 ?
Le statut de la collectivité a changé après la loi Chevènement de 1999 sur la simplification de la coopération intercommunale et la création des communautés d'agglomération. Amiens Métropole est en fait une communauté d'agglomération et non une métropole qui nécessite au minimum 450 000 habitants, mais il ne nous était pas interdit de conserver notre nom, c'est le cas pour d'autres agglomérations. Nous représentons aujourd'hui 186 000 habitants sur 39 communes, nous étions encore 33 communes à ma prise de fonction en 2014. En revanche, ce qui n'a pas changé et ce fut l'une de nos particularités toujours souhaitée par Gilles de Robien dès le départ, c'est la mutualisation des services avec la Ville d'Amiens. L'ensemble du personnel est commun, il est à la fois municipal et métropolitain, nous n'avons pas eu par exemple à investir dans de nouveaux locaux. Dans la même idée à la création d'Amiens Métropole, l'enjeu était d'avoir beaucoup de compétences qui justifient la formation de cette collectivité. Nous prenons effectivement en charge le sport, la culture, l'environnement ou l'eau notamment, en plus de nos compétences obligatoires. Ces conditions ont été perpétuées après la fin de présidence de Gilles de Robien en 2008, je m'inscris moi-même dans cette continuité.

Quelles sont les compétences d'Amiens Métropole ?
Il faut effectivement éviter de faire des doublons en termes de compétences, aux communes l'état civil, le scolaire primaire, l'urbanisme, le commerce, la sécurité ou encore la gestion des centres sociaux. À la métropole, en plus des compétences élargies que j'ai déjà évoquées, nous gérons les domaines de l'habitat, les transports en commun, les ordures ménagères, la politique de la ville, le tourisme... Mais s'il y a un domaine que je considère comme primordial, c'est la compétence économique car de là en découlent aussi l'emploi et des recettes pour la collectivité. Et je peux avancer que la politique économique que nous menons depuis dix ans porte ses fruits : le taux de chômage a baissé de 3%, cela représente 4 000 personnes de plus qui travaillent par rapport à 2010. On entend parfois des critiques sur le fait que la collectivité publique apporte des aides aux entreprises quand celles-ci sont en échec. Il en existe toujours mais les échecs sont infimes par rapport au nombre d'installations et de fait le nombre d'emplois. Les emplois sont même souvent plus nombreux que prévus, d'ailleurs nous ne subventionnons l'entreprise que quand elle a respecté son engagement sur les embauches. Si je prends le seul exemple de la plateforme Amazon à Boves, il est vrai que nous avions anticipé l'aménagement de voies avant même d'être sûrs de sa venue. Mais cela a payé car il ne faut pas oublier que nous sommes en concurrence avec bien d'autres agglomérations et métropoles.
«Le territoire reçoit des demandes d'implantations qui représentent plusieurs milliers d'emplois à venir»
Comment jugez-vous la situation économique de la métropole amiénoise ?
Certes tout n'est pas parfait, même si le taux de chômage a baissé il reste au-dessus de la moyenne nationale, nous avons cependant réduit l'écart. Ces dernières années ont tout de même été marquées par l'implantation de nouvelles entreprises et industries, c'est aussi parce que nous avons fait ce qu'il fallait pour les accueillir. Le territoire continue à recevoir des demandes d'implantations, cela représente plusieurs centaines voire milliers d'emplois à venir. Des sollicitations nous arrivent notamment du domaine des énergies renouvelables, pas celles de l'éolien déjà assez présent dans la Somme, mais citons l'installation fin 2025 à Boves de la gigafactory Tiamat, qui fabriquera ses batteries sodiumion avec 2 000 emplois à terme. Une implantation d'autant plus symbolique que sa technologie, une alternative aux batteries au lithium ou au cobalt, est née à l'Université de Picardie - Jules Verne. Preuve que l'économie et l'emploi se portent bien : la population augmente, nous avons besoin de 800 nouveaux logements par an à Amiens. Des milliers de logements ont été construits et réhabilités ces dernières années.
Le budget de la métropole permet-il de poursuivre une politique ambitieuse ?
Du fait des baisses de dotations de l’État, les moyens ne sont plus ce qu'ils étaient. Depuis 2014, nous avons calculé que si la base des aides aux collectivités avait été simplement maintenue, Amiens Métropole aurait 150 M€ de plus dans les caisses. Cela représente 60% de notre budget annuel de 250 M€, pour la Ville d'Amiens ce sont aussi 100 millions d'euros de moins. Nous sommes obligés d'avoir une gestion extrêmement rigoureuse, de contenir les dépenses de fonctionnement. Je pense que la figure du maire ou du président bâtisseur est derrière nous, il faudra adopter une vision plus modeste, et pourtant 70% des investissements en France viennent des collectivités territoriales. Amiens Métropole continue cependant à investir 40 à 45 millions d'euros par an. Les exemples concrets sont nombreux : 20 millions d'euros pour la deuxième tranche du zoo d'Amiens dans lequel la métropole a investi plus de 45 millions d'euros en deux mandats, 10 millions d'euros dans la rénovation de la piscine Nautilus, sept millions d'euros dans la construction de la nouvelle scène musiques actuelles La Lune des pirates. D'autres réhabilitations d'équipements sont en cours comme la halle des sports Atlantic, le parking de la gare de Longueau, la médiathèque d'Etouvie ou l'investissement énorme dans la rénovation urbaine des trois quartiers prioritaires Pierre-Rollin, Etouvie et Amiens Nord.

Comment voyez-vous l'avenir d'Amiens Métropole dans la grande région Hauts-de-France ?
Je crois en l'avenir du territoire tant que le président de région sera picard. La fusion des deux régions nous a déjà fait perdre le statut de capitale régionale au profit de Lille, alors qu'Amiens a toujours été tournée vers Paris. La coopération avec Lille est toujours très faible, nous aurions espéré plus de projets communs. Les habitants d'Amiens Métropole et de la Picardie ne doivent pas être vus du haut de la région comme des lilliputiens, ils doivent être respectés. Il a été établi que le rapport avec le Nord-Pas-de-Calais doit être de deux tiers/un tiers et de non de 80/20. Le président actuel qui est luimême élu de Picardie est vigilant pour faire respecter cela. Je ne le souhaite pas mais si quelqu'un devait être amené à lui succéder, notre avenir dépendra de ses facultés à comprendre l'équilibre avec notre territoire, celui qui est capable d'accueillir toutes ces entreprises.L'arrivée fin 2026 de la liaison TGV Roissy-Picardie est en cela fondamentale. Bien que ce soit une compétence de l’État, Amiens Métropole y participe aussi, l'enjeu est tellement important.
Amiens en chiffres
3 500 agents
186 000 habitants
250 millions d'euros de budget
Jules Verne, figure emblématique d'Amiens
Comment faire rayonner la ville d'Amiens ? 2025, l'année Jules Verne qui célèbre les 120 ans de la mort de l'écrivain mondialement reconnu, est le moment choisi par la Métropole et la Ville de mettre le point d'honneur à son ambition de faire de Jules Verne la figure emblématique de la capitale picarde. Dès 2018 (votée en 2020), une stratégie touristique a été mise sur pied, concrétisée par le parcours Aronnax
de 20 étapes dans la ville. Le dévoilement du Nauti-Poulpe, une sculpture monumentale en bronze de six mètres de haut, 9,5 mètres de large et 12 tonnes, en sera le point d'orgue. Elle sera inaugurée le 24 mars sur le parvis de la Halle Freyssinet.