2014 : la lutte contre la fraude fiscale s’intensifie
Première étape de l’engagement du gouvernement contre la fraude fiscale, la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, publiée fin 2013, renforce les moyens de contrôle de l’Administration.
Dans un contexte budgétaire difficile, lié à la crise économique et à l’impossibilité d’alourdir la charge fiscale qui pèse sur les ménages et les entreprises, la lutte contre la fraude fiscale n’est qu’une première étape d’un processus global mis en place par le gouvernement afin de réduire les pertes de recettes fiscales.
La fraude fiscale peut être définie comme une infraction à la loi commise dans le but d’échapper à l’imposition ou d’en réduire le montant. D’une manière générale, la nouvelle loi renforce les moyens de contrôle mis à la disposition de l’Administration et les moyens de lutte contre la fraude fiscale.
L’accroissement des moyens de contrôle se traduit tout d’abord par le renforcement des obligations déclaratives à la charge tant des particuliers que des entreprises. Le droit de communication de l’Administration est également étendu.
Les conditions dans lesquelles les services fiscaux peuvent procéder au recouvrement de l’impôt sont facilitées et la loi encadre désormais strictement la conclusion de transactions entre l’Administration et les contribuables.
Un procureur financier
Le fer de lance des moyens de lutte contre la fraude fiscale est la création d’un procureur financier, rattaché au Tribunal de grande instance de Paris, qui a une compétence nationale et est assisté d’enquêteurs spécialisés dans l’investigation des infractions financières.
La création du procureur financier ne s’est pas accompagnée de la suppression de ce qu’il est convenu d’appeler “le verrou de Bercy”, malgré de nombreux débats parlementaires sur le sujet. L’engagement de poursuites en vue de l’application de sanctions pénales sur plainte de l’Administration fiscale reste donc toujours conditionnée à l’avis favorable de la Commission des infractions fiscales.
En ce qui concerne le volet pénal de la loi, les circonstances aggravantes ainsi que le délai de prescription du délit de fraude fiscale sont étendus et les sanctions encourues par les fraudeurs alourdies. Le Conseil Constitutionnel a toutefois censuré un certain nombre de sanctions prévues par la loi, sur le fondement du principe de proportionnalité des peines.
La promulgation de la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale devrait avoir des conséquences immédiates sur la procédure de régularisation de la situation des contribuables détenant des avoirs à l’étranger dont les conditions avaient été précisées dans la circulaire dite “Cazeneuve” du 21 juin 2013. En effet, lors des débats parlementaires, le ministre délégué chargé du Budget, Bernard Cazeneuve avait annoncé la couleur à l’Assemblée nationale : « Je dis donc trois choses aux fraudeurs. […] Deuxièmement, si vous venez après la promulgation de la loi – je vous invite tout de même à le faire -, les conditions seront durcies, mais vous pourrez continuer à régulariser votre situation, dans un cadre certes durci, parce que la loi durcit les peines. »
La lutte contre la fraude entrera prochainement dans une seconde phase, visant à encadrer les pratiques d’optimisation fiscale. La principale mesure du projet de loi de Finances pour 2014 est le durcissement de la définition de l’abus de droit, le motif “exclusivement” fiscal s’effaçant au profit d’un motif “principalement” fiscal, mesure initialement contenue dans le projet de loi de lutte contre la fraude fiscale et supprimée faute de consensus. Il va de soi qu’une telle évolution est annonciatrice d’une insécurité fiscale certaine.
Julien Debels
(julien.debels@fidal.fr)
et Alice Baillet
(alice.baillet@fidal.fr),
avocats en droit fiscal